Sang.

(Peinture murale du grand canyon)


Il se peut que des gouttes de sang s'écoulent à terre . Le sang forme une flaque, puis s'écoule en une figure compliquée dans la poussière . Quand tout le sang sera à terre, comme le serpent, alors peut être ma vie m'aura quittée .

Le temps s'écoule et comme le fleuve, ou encore comme la taupe, il creuse . Dans les falaises de marbre il creuse des puits et des siphons souterrains, envahis d'obscurité . Puis les siphons s'effondrent, se manifestent à la lumière comme canaux et roches brisées .

Des gorges, des falaises apparaissent . Vertigineuses, superbes, leurs fronts noirs de forêts séculaires sous le soleil . Le fleuve coule en bas, très loin, entre le moucheronnage des truites et l'éclat furtif des barbeaux . Sur les bras des fleuves, des îles de galets portent des peupliers, et des plantes à fleurs . Là fut échangé un baiser au soleil, là je m'enracinais dans le soleil .

L'eau a creusé son enfermement, comme la violence de nos vies . Tous ces moments qui ne sont plus toujours distincts, comme ne sont plus distinctes les pierres des îles . Cet amas de choses indistinctes, lourdes, froides, laides, ces prisons de l'âme . Il y a cette angoisse diffuse, cette difficulté à croire le sol solide, ce sens du creusement des puits d'abîme sous les univers des hommes . Le puits d'abîme porté dans le ventre, dans la tête . Les vomissement du matin, ou les convulsions des murènes parmi les tripes, les roches de l'esprit qui se fendent sous le gel, le hurlement qui ne peut être dit, le corps chargé de ces noirs maux violents .


« Au bassin de l'Ange
COMME SI le souvenir amer de la peine rejoignait
Le corps chargé de ces noirs maux violents
l’ultérieur démon immémorial
N'ayant pas trouvé de bel exutoire



QUAND BIEN MÊME LANCÉ DANS DES CIRCONSTANCES ÉTERNELLES
DU FOND D’UN NAUFRAGE



Empoisonné de mes venins
Je suis maintenant l'un de ceux-ci
un banni et un homme errant loin des dieux
je mettais ma confiance dans la Haine insensée


COMME SI errant
Mes pas se feraient alors insaisissables Tant
Aux autres qu’à moi-même aussi légers et
Lourds que le vent chaud d’Algérie qui emplissait ce soir le vide des rues et des passages
vers
ce doit être
le Septentrion aussi Nord

UNE CONSTELLATION


COMME SI le serpent lové dans le ventre de l'homme banni
à l'infini rejoignait sa marche et
l’angoisse suspend chacun de ses pas


C’ÉTAIT
LE NOMBRE
issu stellaire
EXISTAT-IL
autrement qu’hallucination éparse d’agonie


COMME SI les rues et les voyages vers les ténèbres à l'infini rejoignaient
Un boulevard qui allait engager ma mémoire.
Ma mémoire entrechoquée par
Le gémissement des trains humains La nuit
À travers la plaine


COMME SI l'infini des voies de fer était mort Vie et
Envol des oiseaux de feu et
Je regardais je m'orientais me désorientais tandis que
Mort d'inquiétude
je rendais une âme mutique aux étranges hommes qui contemplaient des œuvres d’art Tandis que
Des métros aériens, d’une grâce toute fictive
fusaient
embarquant encore un peu de l’air chaud
très à l’intérieur résume
l’ombre enfouie dans la profondeur par
Cette voile alternative


Des vaisseaux dérivants
D'un long vol vers Le ténébreux vertige
au front invisible
debout
en sa torsion de sirène »



Ce que j'ai vu dans tes yeux noirs dans l'effleurement du premier regard . Et nos inquiétudes qui s'annulent . Et au delà, j'ai embrassé l'aube d'été, l'éclatante lumière du Soleil Invaincu .

La violence creuse son enfermement . Non pas cette violence physique, le sang, mais aussi la tension, la haine, la peur, le désespoir - et surtout la tristesse, la tristesse de l'enfant qui ne voit que l'amertume . Et l'enfant tend à penser que la cause de tout cela, c'est lui ; ou encore qu'il n'est pas assez puissant pour apporter la paix, qu'il apporte le mal et qu'il mérite d'être puni . Mais le mal était là avant, bien avant lui, et bien avant même ceux qui l'ont porté . La douleur n'est pas inessentielle au monde .

Tout cela n'est pas beaucoup assimilé dans l'enfance . L'enfance peut être encore légère, émerveillée . Mais teintée d'un léger voile, comme un paysage baigné dans la brume . Mais le sang est toujours déjà présent .

Alors les baisers sont teintés d'inquiétude, car le malheur qui a eu lieu n'est jamais entièrement reconnu . Aussi tout amour est aussi sourdement le retour de la violence, le retour de la destruction, aussi tout amour est aussi désir de rédemption . Telle est l'Aube de la main gauche . Celui qui connaît une chose précieuse, indéfiniment précieuse, plus que toute vie humaine biologique, que toute principauté de ce monde, que toute fortune hors l'absolu Soleil du Saint - peut la cacher dans une caverne secrète, ou la faire connaître au monde, mais il veut aussi, s'il sait pouvoir la perdre, en dresser un mémorial, tant pour son souvenir que pour le souvenir des hommes .

Toi qui réside dans les eaux et les sources des collines, dans l'obscur des forêts, le sucre des fruits et la splendeur des fleurs, donnes-nous la paix . C'est à dire, permets-nous de combattre non des fantômes qui se dérobent, mais des ennemis . Alors l'héritage du sang sera un bouclier, en un cercle accompli .

COMME SI les mots pouvaient se teinter comme
le ciel ou encore comme le sang
Comme l'entrelacs et l'enlacement


COMME SI la mort de l'espérance et
le début de la grande guerre dans le
Ciel
Je la reconnaissais fulgurante remontée tempétueuse
que se
prépare
s’agite et mêle
au poing qui l’étreindrait
comme on menace
un destin et les vents



Car pour nous, la guerre est la paix . Marguerite brisant des vitres trouve la paix .

Je veux briser mes hautes fenêtres et te retrouver .

Viva la muerte!

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Nu

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Zinaida Serebriakova