Le nomade, ou Attila comme concept.



Le non lieu comme lieu . Être partout chez soi, ou nulle part .

Rouler vers le soleil levant, vers l'Orient . Traverser les villes comme des forêts, et les forêts comme des villes . Être chevalier errant, trouvère des chemins et des saisons, des châteaux, des âmes .

Une ville est comme une forêt, de même qu'une cathédrale, mais inconsciemment, sauf Jérusalem, qui sait . Elle a ses ronces, ses marécages, ses chemins qui ne mènent nulle part . La ville est le grand nulle part, the great nowhere qui absorbe tous les destins dans son ventre énorme, qui fait du crime d'éventreur l'art du minotaure, d'une femme qui aurait pu être, en quête éperdue de reflets de l'être, une victime sacrificielle, une épopée, un mémorial .

Il est possible de se perdre dans les labyrinthes intérieurs comme de se perdre dans une forêt obscure, d'avoir perdu la voie droite . Ou encore comme dans la Ville, ou dans les entrailles ondoyantes du Dragon .

La ville est ce soleil d'où rayonnent les routes, et à ce titre figure de la vie rayonnante, et figure de la mort où tous les chemin mènent . La ville est cette grandeur, et cette forêt où se cachent le Maître et Marguerite, est ce vide, ce vacarme et cette folie palpable de l'Âge de fer .

Le nomade est étranger à la Ville, il est figure du barbare, du fléau de Dieu et des Empires ; mais il n'est cela que par la Ville . Rome prise par Alaric, roi des Wisigoths, fait d'Alaric son amant, et fait l'écriture de la Cité de Dieu par Augustin, le portrait de Rome comme vouée à la destruction divine . Mais même ce portrait est un mémorial d'Alaric .

Peut être l'essence de la Ville se manifeste-t-elle non sur ce qui est immobile, mais sur l'éphémère, la circulation indéfinie, les spectacles, sur les rêves, et plus encore, dans les rêveries ondoyantes du barbare qui se voue à la ville, qui se voue à la dévorer aux sources de ses fleuves . Ainsi la poésie doit-elle lier la Ville au Ciel, pour faire descendre de nouveaux cieux et une nouvelle terre, conformément à l'Apocalypse .

La Ville est plus puissamment imaginale que liée au monde des choses- comme l'iceberg, ce qui fait partie des choses n'est que peu de choses-face aux immenses obscurités translucides qui s'enracinent dans les trois mondes, comme les os souterrains des tombeaux . La Ville est partout, au plus profond des forêts, des montagnes, dans mes mots, ma bouche ; il n'est pas de lieu qui soit encore un lieu autre, le monde, l'espace étant depuis longtemps dévoré par le centre puissant qui le nomme, le construit, le structure de lois .

Nul n'a plus de lieu, et nul qui ne soit à la dérive, nul qui ne soit le hollandais volant, vaisseau fantôme sur les océans multicolores ; mais cela, seul le sait le nomade, enfoui au profond des veines d'émeraude des forêts de l'âme .

Que le soleil se love comme un serpent sur nos couchants, que le soleil intérieur se lève sur nos crépuscules . Que les étoiles luisant dans l'eau se vrillent dans les yeux des noyés, partis vers les fortunes de la mer . Telle est l'essence du nomade, dont le lieu fixe est dans le ciel, car les étoiles fixes l'accompagnent immobiles de leur sphère, en une voute qui est comme les plis de ton manteau .

Et que Dieu me laisse vivre tant que j'ai les mains sous ton manteau .

Viva la muerte !


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Zinaida Serebriakova