Kairos - comme amour de la souffrance du feu interne .


(Malévitch)


L'instant présent est le moment crucial, l'alliance du temps et de l'éternité - le moment où l'éternité fait flamboyer son amour du temps, et éclaire l'abîme du singulier en son mystère . Le moment crucial est le Ciel sur la Terre, ici et maintenant .

Au son de la harpe d'émeraude, il n'est pas d'autre moment crucial que le moment présent . Une occasion ne se représente jamais .

L'étant éclos là, comme une bouche, une fleur d'ombre, le soleil noir qui spirale vers le confluent des deux océans . Ô lune, reflète dans ton cercle blanc comme le corps d'un noyé la lente tristesse de la patience, sur les rives du fleuve .

Tu résistes comme le pin sur la falaise, arbre d'écorce boursouflé et tordu comme la chair de douleur, par le vent . La résistance qui ne peut vaincre, qui ne peut écrire d'histoires, qui ne peut rien chanter, est souffrance – parfois, au dessus des eaux, mon cœur est triste jusqu'à la mort .

Envoie un navire venu des cimes, envoie le batelier hiératique qui mène vers l'autre rive . S'il va vers l'île des morts, je le suivrai – s'il porte les arcs en ciel je le suivrai .

Quand je verrais le pont, l'arc en ciel fermera le demi-cercle de mes chemins dans le cercle solaire – quand le soleil se lèvera à son couchant, à l'Aube d'été des mondes .

Et je marcherais vers les eaux du haut... Je ne m'arrêterai pas avant d'avoir atteint le confluent des deux mers, dussé-je marcher de longues années (Coran, Sourate 40, la caverne)

Le mystère de la vie singulière, de sa légèreté infinie . Le mystère de tes baisers, de ton regard qui me fait naître, nouveau comme un enfantelet parmi les vagues . De tes mains qui donnent la vie, de ton souffle vent solaire, comme l'aurore boréale .

Tu as tenu cette promesse...La nuit vient et il me reste peu de force - Sauve moi comme je t'ai sauvé - ne me laisse pas aux ruines des ténèbres . A chaque hurlement tu as tendu la main, à chaque naufrage tu as porté de l'eau sur mes lèvres dévorées par le sel – à chaque serpent mordant mes tripes tu as donné le cercle de tes bras .

Et aux loups sifflants en moi, aux blizzards qui me traversent, aux pas lents et méthodiques de l'Ankou dans mon crâne, tu as donné la nourriture indéfinie de ton corps, de ton sang, de ta peau – tu as donné le pays des quatre fleuves .

Tu ne croyais pas complètement en la profondeur de l'absolue sincérité qui se cachait sous tes masques, en cette source de vie dans lesquels se lovent et s'impliquent les eaux, les fleuves, les rives, les nuages et le vieil Océan .

Ainsi le chant est sabre, et miroir – révélation de l'Image .

Adam est mâle et femelle– ainsi la Lune reflète le Soleil . Être Lune est être Soleil . Être Soleil est être Lune . Être lune, être Soleil, ne dépend que des cycles de l'Orient . Tu es Soleil et Lune . Je suis Lune et Soleil .

Panthère, tu peux tuer en te jouant . Et comme en te jouant, tu as tendu la main, et vivante tu m'as sauvé la vie .

Voir, là, l'éternité se lever comme une Aube, est devenir vivant - être vivant dans le feu - il n'est rien d'autre pour le vivant . La mort est le nom du Soleil . Le feu noir de la destruction de la vacuité est une porte . Et cette destruction fut aussi l'infini délice de ta couche – l'effusion de la rosée céleste perlant sur la soie, et sur ta peau .

Je fus le chat lové contre la peau . Nous fûmes l'entrelacs du chèvrefeuille sous la Lune et le sommeil du serpent sur la pierre, sous le Soleil .

Le monde, l'ego et l'instant se co-créent dans le feu éternel. Et l'art, dans sa forme la plus haute, est le témoin silencieux de cette foudre - de la paille, et de la cendre - mais aussi le sang versé de la certitude .

Et la morsure de l'attente – au bord de l'abîme, l'attente de voir surgir la grand Léviathan – éclabousse moi de tes baves, ô sublime soleil !

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Nu

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Zinaida Serebriakova