Ordo Carbonari Sylvestris . Et puis, et puis après...?

(La déesse Nuit en extase tantrique)



Mais, ô dieux, détournez de ma langue la folie de ces hommes. Sanctifiez mes lèvres et faites couler d'elles un fleuve pur ! Et toi, très courtisée Muse, vierge aux bras blancs, je te supplie de me faire entendre ce qui convient aux enfants d'un jour ! Fais-moi avancer dans ma voie dès la demeure de la Sainteté et pousse mon char docile ! Des couronnes de gloire et d'honneur de la main des mortels ne te forceront pas à les soulever du sol, afin que, dans ta fierté, tu parles au-delà de ce qui est équitable et droit et que tu gagnes ainsi un siège sur les hauteurs de la sagesse. Commence maintenant, considère de toutes tes forces de quelle manière chaque chose est claire. N'accorde pas à ta vue un trop grand crédit en comparaison de ton oreille, et n'estime pas ton oreille qui résonne au-dessus des claires instructions de ta langue ; et ne refuse ta confiance à aucune des autres parties de ton corps par lesquelles il y a un accès à l'intelligence ; mais considère toute chose de la manière qu'elle est claire. Empédocle .

J'annonce en cette nuit de solstice et de pleine lune, et en présence de Thot, de St Michel et de St Georges la renaissance de l'Ordo Carbonari Sylvestris. Nous tiendrons l'obscur de l'humus,des forêts et des nuits pour le savoir, la poésie et la vie ascendante des sèves. Sol Invictus-l'unique.

Et puis, et puis après ?

Cette question est la plus mystérieuse de toute identité, fermée sur elle comme une veine de métal pur au profond de la montagne, masse de roc immobile, silencieuse et pensante d'un rêve sans mémoire . Car celui qui est tombé comme un corps mort, éperdu dans le labyrinthe de glace, et se relève, est-il...qui est-il ?

Il est une perspective de l'éternité-le cristal- et une perspective du temps-la veine, le sang .

Et puis, et puis après ?

Je est mort, vive je ! Le moi est comme la flamme d'une bougie, que l'on allume le soir, pour lire les récits des morts, que l'on éteint quand le soleil monte au zénith .

Le moi est comme un nuage ; ou encore comme le miroir qui est en quelque sorte, toutes choses, et puissance de toute image de ce qui est image...c'est pourquoi quand un homme meurt dans une maison, l'on voile les miroirs de noir ; ou qu'un miroir se brise pour annoncer un mort . L'homme est miroir, image, et histoire, récit, actes...je suis la somme de mes actes . Je n'est rien qui puisse être saisi, compté, pesé...nous ne possédons pas l'insaisissable, l'insaisissable nous possède .

Non possédant, mais possédé .

Et puis, et puis après ?

Je ne profère pas impunément des mots qui tuent, blessent, condamnent . Les mots ne sont pas innocents, ni inoffensifs ; ils sont des armes, des couteaux aux tranchants maculés de sang, des balles perdues .

Perdues, parce que les longues racines entrelacées des chemins de forêts, des longs apprentissages de mots des Sages de la forêt, ou Druides, ont été coupées...Et il y avait parmi eux un homme d'un rare savoir, versé au plus haut point en toute espèce d'œuvres sages, un homme qui avait acquis la plus grande richesse en connaissances ; car lorsqu'il tendait les forces de son esprit, il voyait facilement chacune des choses qui sont en dix, en vingt vies d'hommes . Racines perdues parce que l'homme moderne est comme un naufragé, absolument nu sur les océans de béton et de fer du siècle, sans mots...les mots sont usés, on ne peut plus les dire...ses paroles sont privées de charge ontologique, de puissance ; aussi bien pense-t-il les mots innocents, ou fantastiques .

Déprivé de mots, l'homme tend au désir du crime et se nourrit de haine . De quels honneurs, de quelle hauteur de félicité suis-je tombé pour errer ici sur terre parmi les mortels ! Je suis maintenant l'un de ceux-ci, un banni et un homme errant loin des dieux, car je mettais ma confiance dans la Haine insensée .

Aussi le voyant est-il aussi en danger, et est-il danger : il est une balle perdue .

Et puis, et puis après ?

L'enchantement des mots doit être proféré à nouveau ; a toujours déjà été présent, comme le Serpent sous la pierre ; tel fut l'objet de la résurrection d'Alamut . L'enchantement des mots pose un être, et est source et lumière d'illumination, comme la musique pour l'âme endormie dans le palais des miroirs, envahi par les ronces et les demeures de forêts .

Il ne faut pas craindre de poser un acte premier sans substance, mais il faut considérer alors qu'il est, en quelque sorte, son propre sujet . Plotin, ennéades VI, 8, 20, 9 .

Et puis, et puis après ?

La question est celle tout à la fois, de la vie poétique et de la révolution . C'est la question, la seule question qui vaille, de la construction des situations, dans le combat désespéré entre les mâchoires de fer des cycles des temps – la nécessité unique, le Trépas, père de la douleur . La mort . Dans l'âge de fer la simple vie, l'acte de respirer la saveur des mondes, se vivre de la Lumière des Lumières est résistance, combat, guerre . C'est ce que découvre le Maître, en voulant publier...

Qu'est ce qui est vie au milieu de la mort, sinon la haute colonne de la fleur unique jaillissant telle une fontaine à travers la neige, la promesse des printemps couronnés de roses ?

La charbonnerie, repliée au milieu des forêts, gardienne des feux voilés, noirs de ténèbres, dans les chemins secrets, est symbolisée par le mot RESISTANCE . Elle est feu et voile, nuit et poignard . Elle est mort et résurrection . Elle est situation et promesse de situation ; silence des bois et verbe secret .

Elle est forêt du Morrois, forêt de Tristan et d'Iseult, science et Verbe des fidèles d'amour . Car la révolte de Tristan-Tantris et d'Iseult aux cheveux de corbeau est la situation par excellence, celle où l'excès de puissance incarnée transgresse la loi non par crime, mais par manifestation solaire que la loi est elle-même le crime, dans la perspective de l'éternité qui le dévore : ton amour est un feu dévorant . De même que la haine des familles dans Roméo et Juliette :

Deux familles, égales en noblesse,
Dans la belle Vérone, où nous plaçons notre scène,
Sont entraînées par d'anciennes rancunes à des rixes nouvelles
Où le sang des citoyens souille les mains des citoyens.
Des entrailles prédestinées de ces deux ennemies
A pris naissance, sous des astres contraires, un couple d'amoureux
Dont la ruine néfaste et lamentable
Doit ensevelir dans leur tombe l'animosité de leurs parents.
Les terribles péripéties de leur fatal amour
Et les effets de la rage obstinée de ces familles,
Que peut seule apaiser la mort de leurs enfants (...)

La Loi de la ville est celle du sacrifice des enfants, obstiné, avide de sang - celle de l'Europe de 1914, celle de la nôtre, ou la Loi du monde . L'Empire est sans recours un crime . C'est pourquoi la Voie est la Voie de la main gauche, celle de la main Droite étant souillée, plus encore que celle qui porte le nom de sinister, ou mort . Il te sera beaucoup pardonné parce que tu as beaucoup aimé - et c'est à la mesure dont vous mesurez que vous serez mesurés . Sinon, que m'arrivera-t-il au jour du jugement ?

Amant libre que tu es, astre errant sur les orbes excentriques, ne te regarde-t-on pas avec méfiance? Et que reste-t-il de l'amour après consumation?- Le pont Mirabeau, Boulgakov, Jivago au plus profond de moi comme des prières d'enfance - Et, grand seigneur moderne- que reste-t-il de ta dignité, de ta puissance, des euros et du béton après ta mort ?

Et tout le refuge des amants célestes est le recours aux forêts, où sont les demeures des charbonniers . Auprès du feu, ma bien aimée, je parcourais les flammes de ta peau, le pays des quatre fleuves .

Je t’ai réveillée sous le pommier ; Mets-moi comme un sceau sur ton cœur, comme un sceau sur ton bras ; car l’amour est fort comme la mort, ses ardeurs sont des ardeurs de feu, une flamme de l’Éternel. Les grandes eaux ne peuvent éteindre l’amour, et les fleuves ne le submergeraient pas ; quand un homme offrirait tous les biens de sa maison contre l’amour, il ne s’attirerait que le mépris .

Qu'est ce que j'écris de plus ?

Le commencement est néant, nuit, et en même temps ce à quoi le devenir fait retour en tant que fondement . La nuit est cette vacuité qui n'est pas rien, puisque l'être doit en advenir – l'être est toujours déjà contenu en lui . L'être humain porteur de puissance est aussi porteur de nuit, enfant de l'ordre noir, fils de l'Aube d'été que j'embrasse . Les mots puissants sont chargés des eaux et des parfums des ténèbres...La nuit est l'implication indéfinie de l'explication des mondes, les voiles immenses et constellés d'étoiles de la chevelure de la déesse .

Et puis, et puis après ?

Après est toujours déjà présent, donné . Il est cette immense puissance, cette coulée de lave rougeoyante qui éclaire et réchauffe . Elle est TA puissance pour peu que tu la fasse tienne, qu'elle serpente à travers toi et te fasse Dragon . Tel est le sens du mot de Crowley : do what thou wilt shall be the whole of the law, Fais ce que tu voudras sera le tout de la Loi . Non pas fais ce que ta volonté de sujet illusoire veut, mais ce que veut la volonté de puissance qui traverse les mondes . Sois puissant de la puissance des étoiles, et deviens ce que tu es . Telle est la Loi des fidèles d'amour .

Car l'homme est un Temple, un foyer qui doit conserver le feu . Ou qui ne peut qu'être rien, s'exténuer indéfiniment comme un bonhomme de neige au soleil, qui voudrait être par lui-même .

Si nous osions allumer le feu...

Et puis, et puis après ?

Regarde et je regarde aussi...

Vive la mort !

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Nu

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Zinaida Serebriakova