Préface à Affleurement de la sphère des choses II, pouvant servir de fragment sur l'écriture sans auteur.


(Paul Gauguin)

A Luis de Miranda, dont je tresse les mots.

En tant qu'exercice de la puissance des mots for the happy few, cette œuvre -affleurement de la sphère des choses 2- est une tresse, un collage . Pour lever toute ambiguïté je place le texte d'un coup de dé jamais n'abolira le hasard sous le nom de Mallarmé dans l'Encyclopédie .

http://encyclopediedusouterrain.blogspot.com/2008/06/m-comme-mallarme.html

Les mots n'ont rien de subjectif . En tant que signes, ils sont dans l'espace de la feuille ou de l'écran comme des objets dans l'espace des choses . Il peuvent être composés, recomposés, dans l'indéfini commentaire entrelacé des mondes . Le sens d'un passage se lie aux alentours, et ainsi le sens est tressé comme le texte . Les variantes d'écriture ne signent pas une différence d'origine, mais un ton, selon une notion proche de la musique .

Les morceaux peuvent être ou non réécrits .

L'auteur est une fiction issue de l'espace des mots . Il n'est d'autre auteur que l'Auteur . Qui est l'auteur, l'inventeur de la langue, de l'écriture, des mots, de la grammaire qui les lie, le dernier à les poser? L'auteur est une puissance ordonnée, collective, comme la création d'un nouveau monde . Ces questions importent les questions juridiques de l'appropriation du monde dans l'espace de la page . L'ordre juridique du monde est impuissant contre le Verbe, puisque le Verbe est une condition de l'expression de l'ordre juridique, donc de sa puissance .

Le Verbe règne sur l'ordre juridique, et l'inversion moderne de la domination est une usurpation . Le sens sera considéré comme le complice de ce qu’il dénonce, pour avoir entrevu sans agir les absurdes mécaniques . La mutinerie est un droit, comme la résistance à l'oppression . La piraterie spirituelle est redevenue possible, et nous sommes ici comme Descartes était en Hollande, à l'abri des inquisitions . Le Verbe n'est pas à notre service, nous sommes, en tant que poète-et la beauté est dans l'œil de celui qui regarde-service du Verbe, pain et vin des mondes .

"Déjà se profilent à l’oraison des champs striés par nos sauts et nos incartades. Apprêtons-nous à ce qu’un monde autre explose d’un coup hors du tableau des visites réglementaires. Les atones seront enterrés vivants. Les villes seront chassées en dehors des géographies.. Nous partons en des terres étrangères, toutes frontières franchies. Et rien ne nous importe que de mourir à ce monde pour incarner le nouveau, par fulgurances ancrées, comme on harponne un monstre. N’allez plus à l’école de la réalité. Créalisons ou mourons. "

L'ordre du Verbe est invoqué pour dévoiler à nouveau sa puissance, sa lumière, son incarnation ici et maintenant . Le Verbe est beauté, et position d'un ordre . L'ordre est justice et beauté selon la puissance qui le fonde, l'immense désir, la nostalgie des mondes . Ou mourons ! Sur la page, le poète, nu dans le monde des choses, est roi, et pratique l'art royal . Mais sa royauté n'est pas liée à sa personne, mais à l'intensité de son effacement, selon les paroles de Jakob Böhme :

"Si tu peux une heure durant faire silence de tout ton vouloir et de toute ta pensée, alors tu entendras les paroles inexprimables de Dieu"

Car qu'est ce qu'un poème, sinon une figure de la guerre, la guerre dans le Ciel ? Cette guerre est celle du combat de Jakob-notre père- avec l'Ange . Guerre des ténèbres, dans la poussière, guerre des douleurs- guerre d'une exigence issue des fondations de l'humanité, de la cruauté intime de l'homme-"la voix du sang de ton frère crie du sol vers moi" : "je ne te laisserai pas que tu ne m'aies béni"...guerre de ce fils de démon boiteux qu'est l'homme,

"Les Anges virent que les filles des hommes étaient belles et ils prirent pour femmes celles de leur choix"

Guerre des grincements de dents pour exprimer l'inexprimable . "Nous nous conformons à de vieilles époques, et rien encore n’aurait été inventé de l’autre côté de la limite du réel ?"

Et invocation, magie des mondes soulevés par le Verbe comme la tempête invaincue, tempête dans mon coeur comme tempête sur les rues, la nuit .

Oh que d'aurores sublimes j'ai rêvées !

Et nous les ferons advenir dans le monde. Ou mourons.

Vive la mort!

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Zinaida Serebriakova